PCR Médicale.
Juin 2020.
Article R.
4451-11
Dans le
cadre de l'évaluation des risques, l'employeur, en collaboration, le cas
échéant, avec le chef de l'entreprise extérieure ou le travailleur non salarié,
procède à une analyse des postes de
travail qui est renouvelée périodiquement et à l'occasion de toute modification
des conditions pouvant affecter la santé et la sécurité des travailleurs.
Lors d'une
opération se déroulant dans la zone contrôlée définie à l'article R. 4452-1,
l'employeur :
1° Fait procéder à une évaluation prévisionnelle de la dose collective et
des doses individuelles que les travailleurs sont susceptibles de recevoir lors
de l'opération ;
2° Fait définir par la personne compétente en radioprotection, désignée en
application de l'article R. 4456-1, des objectifs de dose collective et
individuelle pour l'opération fixés au niveau le plus bas possible compte tenu
de l'état des techniques et de la nature de l'opération à réaliser et, en tout état
de cause, à un niveau ne dépassant pas les valeurs limites fixées aux articles
D. 4152-5, D. 4153-34, R. 4451-12 et R. 4451-13. A cet effet, les responsables
de l'opération apportent leur concours à la personne compétente en
radioprotection ;
3° Fait mesurer et analyser les doses de rayonnement effectivement reçues
au cours de l'opération pour prendre les mesures assurant le respect des
principes de radioprotection énoncés à l'article L. 1333-1 du code de la santé
publique. Lorsque la technique le permet, ces mesures sont effectuées de
manière continue pour permettre une lecture immédiate de leurs résultats.
L’objectif d’une étude de poste de travail
présentant un risque d’exposition aux rayonnements ionisants est d’évaluer,
dans des conditions normales de travail, les doses susceptibles d’être reçues
par le personnel.
Dans un cadre général lié au risque
radiologique il convient d’estimer l’exposition externe et l’exposition
interne.
L’analyse permet d’identifier les sources
d’exposition mais aussi les autres sources de danger pour estimer les risques
afin de mettre en œuvre les actions de prévention adaptées et d’apporter des
éléments pour la gestion d’incidents éventuels.
L’étude de poste va permettre également de
fournir un certain nombre d’éléments au chef d’établissement et au médecin du
travail pour :
· mettre en place les équipements de protection
collective et les consignes de sécurité,
· renseigner la fiche d’exposition associée au
poste de travail,
· le cas échéant, définir les équipements de protection
individuelle,
Le médecin du travail sur la base de la fiche
va proposer à l'employeur le classement des travailleurs exposés de la
catégorie A ou B.
L’étude de poste amène également des données
concernant les mesures d’ambiances pour mettre en place le zonage. Les zones
réglementées vont être définies en fonction des risques présentés par les
sources de rayonnements. Mais les mesures qui vont être réalisées seront faites
sur des points judicieusement choisis. A tel point que si vous définissez une zone
réglementée par rapport à un risque d’exposition des extrémités, c’est bien
qu’il y a quelqu’un à un poste de travail !
La délimitation des zones réglementées va
permettre de choisir les dosimètres d’ambiance et les dosimètres individuels
adaptés et nécessaires pour accéder à ces zones.
A l’issue des résultats il sera peut-être
nécessaire de se poser la question de l’optimisation en radioprotection.
Ce document présente une méthode générale
d’évaluation de la dose liée aux expositions externe et interne au poste de
travail. Elle se décline en trois phases :
· la préparation de l’étude,
· l’évaluation des doses en n’oubliant pas les
autres risques qui peuvent être présent et dans certains cas influer sur ce
risque radiologique,
· l’exploitation des résultats obtenus.
1 ÉVALUATION DES RISQUES PROFESSIONNELS (EVRP) ET ÉTUDE DE POSTE
L’étude de poste s’inscrit également dans une
démarche consistant à l’évaluation des risques professionnels.
Cette évaluation des risques pour la sécurité
et la santé des travailleurs s’inscrit dans un contexte réglementaire (Décret
2001-1016 du 05 novembre 2001).
Il est nécessaire de déterminer le périmètre
de l’évaluation des risques (unité de travail), d’identifier les sources de
danger, de quantifier et de hiérarchiser les risques. Il est enfin nécessaire
d’identifier et, si besoin, programmer les actions de prévention et de
protection nécessaires
La démarche consiste donc à regarder les
points au fur et à mesure :
Éviter les risques
Évaluer les risques qui ne peuvent pas être
évités
Combattre les risques à la source
Adapter le travail à l'homme
Conception des postes de travail, choix des
équipements de travail et des méthodes de travail et de production
Réduire les effets de ceux-ci sur la santé
Remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne
l’est pas ou qui l’est moins
Planifier la prévention en y intégrant
l'organisation du travail, les conditions de travail, l'influence des facteurs
ambiants
Prendre des mesures de protection collective
puis éventuellement individuelle
Donner les instructions appropriées aux
travailleurs
2 PRÉPARATION
La phase de préparation de l’étude de poste
consiste à recueillir des informations relatives d’une part à l’installation
qui comprend la ou les sources produisant des rayonnements ionisants et les
dispositifs de protection associés, d’autre part aux tâches effectuées à ce
poste par le personnel.
Afin de prendre en compte les pratiques
professionnelles dont la fréquence et la nature sont susceptibles de varier
dans le temps, une moyenne sur une période représentative peut être effectuée.
Il sera également important de prendre en
compte le niveau de formation des agents à ce poste de travail (est-ce un
nouvel embauché ? Est-ce une personne en mutation qui a déjà travaillé sur ce
genre d’équipements ?).
Les informations
à recueillir lors d'une analyse d'un poste de travail, peuvent être
organisées selon les rubriques figurant ci-dessous. Vous pouvez bien entendu
choisir un autre classement. Les questions qui sont posées ne sont pas
exhaustives. Vous pouvez enrichir votre questionnaire en fonction de points
spécifiques.
Ces différentes informations doivent faire
par la suite l'objet d'une réflexion, afin de dégager les éléments pertinents
pour la sécurité classique et radiologique.
1 les objectifs à atteindre
2 l’organisation du travail
3 les équipements utilisés
4 les procédures et les modes opératoires
5 le poste et son environnement
a le risque radiologique
b les risques classiques
c l’architecture du poste
d les facteurs d’ambiance
e la signalisation
2.1 Les objectifs à atteindre
Voici les questions qui peuvent être évoquées
avant même d’aller sur le poste de travail :
Quelles sont les principales caractéristiques
des tâches confiées à l'opérateur ?
Quels sont les objectifs de ce travail ?
Quelle est la chronologie des tâches qui lui
sont confiées ?
Quelle est la classification de ces tâches
(tâches routinières, tâches aléatoires, tâches de récupération d'incidents) ?
Y a-t’il d’autres
postes de travail qui dépendent de cette activité ?
Quelles sont les principales causes de
fluctuation des tâches et quels sont les moments de plus fortes contraintes de
temps ?
2.2 L’organisation du travail
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Quelle est rapidement décrite l'organisation
du travail dans laquelle se trouve inclus le poste ?
Quelle est la structure de l'équipe de travail
(équipe constituée uniquement du personnel de l’entreprise, équipe constituée
du personnel de l’entreprise et de sous-traitants...) ?
Quels sont les horaires de travail pratiqués
(journée normale, service continu comme les 3x8) au niveau du poste ?
Y a-t-il des
opérateurs expérimentés qui pourraient être des personnes ressources notamment
en matière de formation au poste de travail ou dans l’explicitation des
procédures ?
Quel est l'état de la formation des membres de
l'équipe à la sécurité classique et radiologique (formations suivies, dates de
ces formations...) ?
Y a-t-il des agents
dévolus spécifiquement à des tâches de sécurité (PCR, Ingénieur de sécurité,
Equipe de Première Intervention, etc) ?
Quelles sont les options possibles concernant
l’optimisation en radioprotection ?
Quelle est la proportion de personnel féminin
?
2.3 Les équipements utilisés
Établir une liste exhaustive des équipements
utilisés :
Quels sont les équipements de travail qui sont
utilisés de manière continue au poste de travail et ceux dont l'utilisation
nécessite une habilitation ?
Quels sont les équipements de travail qui sont
utilisés de manière occasionnelle au poste de travail ?
Quels sont les équipements de protection
collective qui sont implantés ?
Quels sont les équipements de protection
individuelle qui sont mis à disposition sur le poste de travail ?
Ces équipements sont-ils portés ou utilisés ?
2.4 Les procédures et les
modes opératoires
Précisez les relations qui existent entre l'activité
de travail et les procédures, les modes opératoires, les consignes
particulières, la réglementation.
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Quelles sont les procédures, les modes
opératoires et les consignes particulières qui régissent l'activité au poste de
travail ?
Les aspects sécurité sont-ils pris en compte
dans ces documents ?
Quelles sont les tâches et les opérations qui
ne font pas l'objet d'un mode opératoire écrit (quelles sont les tâches faisant
l'objet d'apprentissage par compagnonnage) ?
Est-ce que l'application de certains modes
opératoires, de certaines procédures ou consignes particulières posent des
problèmes dans la réalisation de certaines tâches ?
Pour le personnel féminin, quelles sont les
procédures et affectation en cas de grossesse?
2.5 Le poste et son
environnement
Il est intéressant en fonction du poste de
travail étudié de connaître sa situation dans un bâtiment par exemple.
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Y a-t-il des accès
extérieurs ?
Est-ce à l’étage ou au rez
de chaussée ?
Quels sont les accès possibles au local ?
2.5.1 Les risques
radiologiques
Établir un schéma du local de travail, en
indiquant la position du ou des postes de travail, l'emplacement des sources,
les débits de doses (s’ils sont déjà connus. Sinon cela va faire partie de la
deuxième partie « évaluation des doses »).
Indiquez la nature du ou des risques dans ce
domaine et les moyens utilisés pour s'en protéger.
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Quels sont les radionucléides manipulés ou
quels sont les appareils qui émettent des rayonnements ?
A quels types de risques sont soumis les
opérateurs (exposition interne, externe, criticité) ?
Quelles sont les activités maximales mises en
œuvre au poste et dans son environnement et quels sont les débits de doses
maximums correspondants (s’ils sont connus) ?
Quels sont les champs de rayonnements associés
(géométrie, nature du rayonnement, énergie, débit, orientation, etc.),
Y a-t-il présence de
contamination surfacique ou atmosphérique existante ou potentielle ?
Quelles seraient alors la nature des
radionucléides et les formes physico-chimiques associées ?
Quels sont les moyens de détection (appareils
de radioprotection présents sur le poste de travail) ?
Quels sont les moyens de prévention collectifs
et individuels ?
Quelle signalisation est en place (si elle
existe déjà) ?
Quelles sont les phases de l'activité de
travail (quelles tâches) les plus critiques du point de vue du risque
radiologique ?
Quels sont les moyens permettant de les
maîtriser (procédures, consignes - recours à une personne compétente -
formation spécifique - mise en place de systèmes de détection) ?
Quelles sont les dispositions prises en
matière de stockage temporaire de sources ?
Quelles sont les dispositions prises en
matière d’entreposage temporaire des déchets ?
Y a –t-il du matériel d’urgence prévu pour
faire face à un incident ?
2.5.2 Les risques classiques
Article R. 4452-23
L'employeur définit les
mesures de protection collective adaptées à la nature de l'exposition
susceptible d'être subie par les travailleurs exposés.
La définition de ces mesures prend en compte les autres facteurs de risques
professionnels susceptibles d'apparaître sur le lieu de travail, notamment
lorsque leurs effets conjugués sont de nature à aggraver les effets de
l'exposition aux rayonnements ionisants.
Elle est faite après
consultation de la personne compétente en radioprotection mentionnée à
l'article R. 4456-1, du médecin du travail et du comité d'hygiène, de sécurité
et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel.
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
· Risques de heurt ou de chute de personnes ou
d'objets.
Quels sont les risques de heurt ou de chute de
personnes ou d'objets dans la zone de travail ?
· Risques d'origine mécanique.
Quels sont les risques d'entraînement,
d'écrasement, de cisaillement, de sectionnement provenant des pièces en
mouvement ?
Quels sont les gestes critiques du point de
vue de ces risques ?
· Risques de coupure ou de piqûre par
manipulation.
Quels sont les risques de coupure ou de piqûre
par manipulation, en vous référant aux points suivants à examiner : désignation
des objets dangereux, absence de protection adaptée, types de manipulations
concernées du point de vue de ces risques ?
· Risques de projection de produits liquides.
Quels sont les risques de projection de
liquides (acides, bases, mélanges...), en vous référant aux points suivants à
examiner : désignation des produits, absence de protection adaptée, types de
manipulations concernées par ce risque ?
· Risques liés à l'utilisation de produits
chimiques ou dangereux.
Quels sont les risques liés à l'utilisation de
produits dangereux en vous référant aux points à examiner suivants : nature des
produits utilisés - conditionnement, entreposage, étiquetage - manipulations
exposant à des risques de contact, d'inhalation, d'ingestion - absence de
protection efficace ?
· Risque d'origine électrique.
Quelles sont les principales sources de risque
dans ce domaine, les équipements sont-ils en conformité ?
· Risque d'incendie, d'explosion.
Quelles sont les principales sources de risque
dans le domaine et les conséquences potentielles ?
· Risque lié au travail en atmosphère confinée
Quelles sont les principales sources de risque
dans ce domaine et les conséquences potentielles ?
· Risque lié au travail avec des lasers
Quelles sont les principales sources de risque
dans ce domaine et les conséquences potentielles ?
· Risque lié au travail avec des produits
biologiques
Quelles sont les principales sources de risque
dans ce domaine et les conséquences potentielles ?
· Risque lié au travail avec des liquides
pouvant déborder, risque d'inondation...
Quelles sont les principales sources de risque
dans ces domaines et les conséquences potentielles ?
2.5.3 L’architecture du poste
de travail
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Existe-t-il dans la conception et
l'aménagement du poste de travail, des éléments qui conduisent l'opérateur à
adopter des postures pénalisantes ou dangereuses ?
Quelles sont les positions correspondantes ?
Y a-t-il des
différences entre les opérateurs pouvant obliger à des changements
d’équipements ?
Points à examiner : mauvaise définition des
plans de travail par rapport au travail à réaliser, mauvaise conception ou
emplacement inadapté des commandes et des moyens de signalisation visuelle,
difficultés à combiner action sur les commandes et prise
d'information.
Opérateurs de taille franchement différente.
L'activité de travail oblige-t-elle
l'opérateur à se déplacer en portant des produits, ou des outils ? Dans
l'affirmative, précisez les tâches concernées.
L'activité de travail sur le poste peut-elle
entraîner des efforts pénalisants ou dangereux (port de charges, travail en
tenue ventilée...) ?
2.5.4 Les facteurs d'ambiance
(éclairage, niveau sonore, ambiance thermique, ventilation).
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Quels sont les facteurs d'ambiance
susceptibles de compliquer la réalisation des tâches et de constituer de ce
fait des facteurs de risque ? (l'éclairage, le niveau sonore, l’ambiance
thermique, la ventilation et l'assainissement de l'air).
2.5.5 La signalisation
Voici les questions qui peuvent être évoquées
:
Quels sont les panneaux de signalisation
existants ?
Sont-ils adaptés aux risques ?
Sont-ils apposés sur tous les accès ?
3 ÉVALUATION DES DOSES
Si vous partez sans aucune donnée vous allez
devoir réaliser cette évaluation des doses.
Elle doit être effectuée dans des conditions
réalistes du poste de travail, c'est-à-dire telles qu’elles se présentent lors
du fonctionnement normal de l’installation.
Les données nécessaires à l’évaluation des
doses peuvent être issues de mesures, de calculs, de données publiées dans la
littérature, et de l’analyse du retour d’expérience du fonctionnement de
l’installation (historique dosimétrique par exemple).
Deux étapes sont ici proposées, à savoir :
- établissement de la cartographie des
équivalents de dose et, s’il y a lieu, détermination des niveaux de
contamination associés,
- détermination de la dose pour chaque tâche.
3.1
Cartographie des équivalents de doses de l’installation
Les débits d’équivalent de dose doivent être
calculés ou mesurés aux points
représentatifs des positions occupées par les travailleurs, ainsi qu’en des
points permettant d’établir la cartographie dosimétrique des locaux dans la
zone d’évolution des travailleurs.
Les évaluations visant à classer le personnel
sont effectuées en tenant compte du port éventuel d’équipements de protection
individuelle, comme par exemple derrière un tablier plombé. A l’inverse et il
convient de le préciser une nouvelle fois, le zonage des locaux se fait
uniquement en fonction des sources de rayonnements sans prendre en compte les
équipements de protection individuelle.
Notons que pour certaines installations
(générateurs X, accélérateur de particules, etc.), une mesure directe de débit
peut être rendue très difficile, voire impossible compte tenu des techniques
disponibles, en particulier en raison de très courtes durées d’irradiation (un
cliché en radiologie par exemple), ou du caractère pulsé de l’installation. Il
convient dans ce cas d’effectuer une mesure d’équivalent de dose en mode
intégration sur la durée totale de l’irradiation.
Si l’équivalent de dose est divisé par la
durée effective totale de l’irradiation, c’est le débit instantané,
c'est-à-dire celui présent en cours d’impulsion, qui est déterminé.
Si la division est faite par la durée de
mesure, le résultat correspond à un débit moyen, c'est-à-dire prenant en compte
les périodes d’absence d’irradiation entre chaque impulsion.
3.2
Détermination des niveaux de contamination
L’évaluation des niveaux de contamination
atmosphérique (Bq.m-3) de chacun des radionucléides identifiés doit
être réalisée à la position occupée par les travailleurs. Cette évaluation doit
de toute façon être réalisée pour mettre en place le zonage radioprotection du
local.
La contamination surfacique (Bq.m-2)
doit être évaluée pour toute surface susceptible d’être contaminée, comme par
exemple les surfaces sur lesquelles sont manipulées des sources radioactives
non scellées.
Pour des contaminations labiles (non fixées),
il est possible de déterminer leur contribution à la contamination
atmosphérique par l’application de coefficients de mise en suspension dans
l’air (m-1). Comme ces coefficients dépendent des caractéristiques
de la contamination, de la nature de la surface contaminée et des conditions
environnementales (humidité, température), le choix de leurs valeurs est
délicat et doit faire l’objet d’une étude spécifique.
3.3 Dose associée à chaque
tâche
L’évaluation de la dose au poste de travail
doit correspondre à la somme des doses, qu’elles soient d’origine interne ou
externe, associées à chacune des tâches.
Néanmoins, dans un premier temps, l’étude peut
être faite pour les tâches contribuant a priori à l’essentiel de la
dose. Il convient d’être vigilant vis-à-vis des tâches peu dosantes
individuellement mais fréquentes.
Pour l’exposition externe, dans le cas d’une
tâche « statique », le débit d’équivalent de dose évalué à la position de
l’opérateur et/ou de sa partie du corps la plus exposée est à multiplier par la
durée. Pour une tâche pouvant être décomposée en sous-tâches statiques, on
effectuera la somme des diverses contributions évaluées par la même méthode. Un
opérateur travaillant devant une boîte à gants peut être considéré comme
réalisant une tâche (ou une sous-tâche) statique, pour ce qui concerne
l’exposition au niveau du corps entier.
Dans le cas d’une tâche «dynamique»,
l’approche à partir des débits d’équivalent de dose n’est pas adaptée. Dans la
pratique, il convient alors d’effectuer une mesure d’équivalent de dose en mode
intégration en reproduisant la tâche telle qu’elle est réalisée par le
travailleur.
Par exemple, dans une boîte à gants les mains
du même opérateur réalisent une tâche dynamique. Dans ce cas, les doses sont
généralement évaluées au moyen de dosimètres passifs fixés sur un ou plusieurs
doigts et portés durant une période représentative.
Pour ce qui concerne l’exposition interne,
bien qu’il faille ne pas négliger les contaminations par voie cutanée,
l’inhalation constitue la voie la plus probable d’incorporation de
radionucléides dans l’organisme.
Une première évaluation de la dose efficace
engagée peut donc être effectuée en tenant compte des valeurs qui ont permis à
réaliser le zonage. Le CEA a proposé la définition de Repères en Concentration
Atmosphérique (RCA) qui permettent d’avoir immédiatement un ordre de grandeur.
De plus si la mesure de l’activité volumique de l’air se fait en temps réel, il
est aisé d’en faire un suivi. Cette évaluation permet également de définir le
zonage radioprotection.
La grandeur opérationnelle intitulée « repère
en concentration atmosphérique (RCA) correspond, pour un radionucléide donné, à
l’activité
volumique moyenne (Bq.m-3) qui conduit, suite à l’exposition d’une
personne pendant une heure, à une dose efficace engagée de 25 µSv. Cette
grandeur opérationnelle permet de vérifier la conformité du zonage lié à un
risque d’exposition interne par inhalation, par comparaison avec la mesure par
prélèvement atmosphérique de l’activité volumique moyenne représentative d’une
exposition d’une heure dans les conditions habituelles de travail. Elle est définie comme suit :
où :
dr est le débit respiratoire d’une personne au
travail : 1,2 m3.h-1
DPUI est la dose par unité d’incorporation
d’un radionucléide, exprimée en Sv.Bq-1, définie en fonction de la granulométrie
et de la forme physico-chimique dans les tableaux de l’arrêté du 1er
septembre 2003.
Plusieurs valeurs peuvent exister pour un même
radionucléide présentant des formes chimiques différentes. En cas de doute sur
la forme chimique, la valeur la plus restrictive est à prendre en
considération. En cas d’inhalation, la vitesse de transfert d’un radionucléide
vers un organe dépend de sa forme physico chimique. Pour établir les DPUI,
trois facteurs de transfert ont été retenus:
F : fast (rapide)
M : médium (moyen)
S : slow (lent)
Pour mémoire, dans le cas des radionucléides
solides ou liquides, les DPUI sont calculées pour des aérosols de diamètre
aérodynamique médian en masse de 1 ou 5 µm. Si l'on veut utiliser le
coefficient approprié, il convient d'avoir préalablement effectué des mesures
granulométriques. Ceci nécessite d'avoir réalisé une analyse sur les modes de
production (effet mécanique, calorifique,…) et la ventilation des locaux
(aspiration, soufflage, zones mortes,..).
Lorsque la granulométrie des aérosols n’est
pas connue, la valeur de la DPUI retenue par défaut pour évaluer les RCA sera
celle correspondant à 5 µm (annexe 3 de l’arrêté du 1er septembre
2003 relatif aux modalités de calcul des doses efficaces et des doses
équivalentes résultant de l’exposition des personnes aux rayonnements
ionisants).
Cependant, en cas d’incident conduisant à une
inhalation de radionucléides par un salarié, il appartiendra au médecin du
travail de décider ou non de retenir la valeur de DPUI conduisant à la dose
efficace la plus restrictive en attendant d’avoir des informations plus
précises sur les aérosols en cause.
Dans le cas particulier des gaz rares où la
contamination atmosphérique conduit à une exposition externe par immersion dans
le nuage radioactif, la valeur de la RCA n’est pas calculée par rapport à la
formule définie ci-dessus mais déduite directement du coefficient de dose par
unité de concentration dans l’air intégrée dans le temps (Sv.j-1/Bq.m-3)
donné dans l’annexe 3 de l’arrêté du 1er septembre 2003.
Exemple d'application pour une installation où
l’on manipule du 90Sr+90Y : le coefficient de dose par
unité d'incorporation (DPUI) est pris égal à 1,5.10-7 Sv.Bq-1
pour une forme physico-chimique ayant un transfert lent dans l’organisme et une
granulométrie de 1 µm. En reprenant la formule précédente on obtient :
Ainsi, une activité volumique moyenne de 140
Bq.m-3 mesurée au moyen d’un prélèvement atmosphérique durant une
heure dans une zone en présence de 90Sr+90Y conduit à la
limite supérieure d’une zone contrôlée.
Il est également important de tenir compte des
équipements de protection dans l’approche de l’étude de poste. On conçoit
difficilement qu’un opérateur puisse accéder dans une zone orange où il y a un
risque de contamination atmosphérique sans avoir revêtu de protection
individuelle.
De même il est bon de rappeler que d’un point de vue pratique, un radioprotectionniste aura des
difficultés à délimiter une zone surveillée ou contrôlée verte par rapport au
seul risque d’exposition interne. Il s’interrogera fatalement sur l’origine
d’une contamination atmosphérique chronique, afin de l’éliminer le plus
rapidement possible.
Enfin, l’évaluation des doses peut être
complétée en considérant des situations plausibles s’écartant des conditions normales
de travail, par exemple une tâche de durée plus longue que prévu en raison
d’une difficulté technique, ou celles relevant de mauvaises pratiques, telles
le défaut d’utilisation d’équipements de protection radiologique.
4 EXPLOITATION DES RÉSULTATS ET RETOUR D’EXPÉRIENCE
L’évaluation des doses (externe + interne)
décrite précédemment permet de bien identifier les risques d’exposition aux
rayonnements ionisants et sert de base à la classification du personnel et au
processus d’optimisation de la radioprotection.
4.1
Dosimétrie et classification du personnel
Dans le cas de l’exposition externe, les
équipements de protection individuelle sont à prendre en compte. Les données
collectées doivent permettre d’estimer les doses que les travailleurs sont susceptibles
de recevoir au corps entier (dose efficace) ou sur une partie du corps (dose
équivalente), ceci pour une durée d’une année.
Pour chaque travailleur, il convient de
considérer les tâches qu’il réalise en moyenne sur une période de référence. Les
doses associées à chaque tâche sont pondérées par la fréquence de réalisation
de la tâche, puis sommées, et le résultat est extrapolé sur une base annuelle.
Si cette extrapolation conduit à des valeurs
supérieures aux trois dixièmes d’une des limites réglementaires Annuelles, le
travailleur est classé en catégorie A.
Dans le cas contraire, si la dose efficace est
plus grande que 1 mSv, ou si l’une des doses
équivalentes au cristallin (yeux) et à la peau (en valeur moyenne pour toute
surface de 1 cm2) est respectivement plus grande que 15 mSv et 50 mSv (article R. 1333-8
du code de la santé publique), le travailleur est classé en catégorie B.
Sinon il peut être considéré comme non exposé.
Cependant, par rapport aux extrapolations
précédentes, il est recommandé de considérer une marge de sécurité. En tout
état de cause, la définition des catégories du personnel relève in fine de
la responsabilité du chef d’établissement, après avis du médecin du travail.
4.2
Optimisation de la radioprotection
Le principe d’optimisation de la
radioprotection est défini à l’article L. 1333-1 du code de la santé publique :
« L'exposition des personnes aux rayonnements
ionisants […] doit être maintenue au niveau le plus faible qu'il est
raisonnablement possible d'atteindre, compte tenu de l'état des techniques, des
facteurs économiques et sociaux et, le cas échéant, de l'objectif médical
recherché. » et rappelé dans l’article R. 4451-11 du code du travail.
L’étude de poste de travail est un des
éléments du processus d’optimisation car elle permet d’identifier les tâches
contribuant à l’essentiel des doses reçues ; par suite elle permet donc
d’améliorer les protocoles sur la base d’une analyse comparative des
différentes solutions possibles, et de mettre en œuvre les protections
adaptées. Parmi les actions le plus fréquemment envisagées, on relève :
· la réduction de la durée et/ou de la fréquence
des tâches,
· l’augmentation de la distance à la source de
rayonnements,
· l’utilisation d’équipements de protection
collective et individuelle supplémentaires ou mieux adaptés,
· l’optimisation des paramètres des sources
radioactives.
L’étude de poste et l’optimisation de la radioprotection doivent être
menées conjointement en suivant une logique itérative.
En fonction des résultats obtenus se poser la
question (si nécessaire) de la mise en œuvre d’actions en matière
d’optimisation.
Exemples : ajout d’une protection biologique,
changement d’équipements de protection individuelle plus adaptés, formation aux
postes de travail remaniée, répétition de la gestuelle sans présence de
radioactivité,…
4.3
Anomalies et Incidents
Y a-t-il eu des anomalies
et incidents sur ce poste de travail ?
· en respectant les procédures
· sans respect des procédures
Ces incidents ont-ils fait l’objet d’une
déclaration :
· comme événement intéressant la radioprotection
· comme événement significatif en radioprotection
auprès de l’ASN
4.4 Les accidents du travail
et les maladies professionnelles
Y a-t-il eu des
précédents en termes de déclaration d’accident du travail ou de maladie
professionnelle ?
En rappeler les circonstances.
4.5 Enregistrement de l’étude
de poste de travail
Rappel réglementaire
Article R.
4454-1
Un
travailleur ne peut être affecté à des travaux l'exposant à des rayonnements
ionisants qu'après avoir fait l'objet d'un examen médical par le médecin du
travail et sous réserve que la fiche médicale d'aptitude établie par ce dernier
atteste qu'il ne présente pas de contre-indication médicale à ces travaux.
Cette fiche
indique la date de l'étude du poste de travail et la date de la dernière mise à
jour de la fiche d'entreprise.
La personne compétente en radioprotection
devra transmettre la date à laquelle l’étude de poste a été réalisée au médecin
du travail.
Source : Marc Ammerich et Franck Baumann pour PCR Médicale; Rev. 2020.06.01 "pcr.medicale@gmail.com".